L’océan et ces côtes m’ont interrogé sur le plus loin, l’après, le tumulte, la séparation.

HORIZON

Lorsqu’enfant nous visitâmes Monaco …

Devant les canons de la citadelle princière, je pris conscience de l’horizon comme limite.

Mais qu’est-ce qu’il y a après l’horizon, cette ligne devant nous, mon père me répondit :
– l’Algérie, de l’autre côté de la Méditerranée.

Réponse parfaitement adaptée à ma double culture, la lyonnaise paternelle et bucolique, et l’outremer maternel et solaire.

Peut-être le début de cet état de la pensée que l’on appelle l’abstraction, cet ailleurs invisible, mais senti et perçu comme existant, est-il devenu une constante de ma vision depuis lors.

Je me souviens des platanes de la place de l’église, je les regardais intensément au point de perdre la netteté, le cadre et de me laisser emporter par le balancement des branches et le vert frémissant des feuilles dans le bleu du ciel.

Oui, je suis redevable à la peinture de ma proximité avec la nature, la mer, la terre, le ciel, avec le sacré.
Tant de peintres ont trouvé dans les vagues, les ports, les plages, les bateaux, un lieu ou poser leurs chevalets, où mettre en œuvre la puissance de leur mémoire.

L’océan et ces côtes m’ont interrogé sur le plus loin, l’après, la séparation., le tumulte.
Interrogé sur la limite humaine de la perception du monde, cet horizon ricochant sur l’infini du cosmos nocturne. Voyons-nous plus dans l’obscurité d’une nuit étoilée dans les attributs des constellations que l’antiquité a nourris de symbolique.

L’horizon en face, mais l’horizon de côté, les rochers qui semblent retenir encore les forces de la création du monde emprisonnant des esprits primordiaux.

C’est sur ces chemins, lieux de peinture, déjà tant visités que j’ai laissé émerger la trace de mon propre passage, une respiration du vivant.

L’acte photographique comme manifestation de l’existence, le sujet étant plus un enjeu esthétique et poétique de fondation, d’enracinement qu’un état descriptif, documentaire.

La falaise accueille la mer souvent avec violence, la plage en douceur, au même endroit.
Sans fin dans le mouvement, un siège de la terre, l’épuisement d’un lieu.

Que reste-t-il sur les plages de Dunkerque, d’Omaha, de Sainte Marguerite, sinon la trace du tragique de l’histoire et celle de l’humanité qui continue son chemin.